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evaevrard@gmail.com
Depuis les premiers rouleaux de papier calligraphiés aux sculptures en céramique, en passant par les livres d’artistes et les maquettes ou prototypes, mon travail n’a cessé de s’amplifier, de se déployer dans l’espace, pour impliquer le regardeur dans toute sa corporalité.
Ces dernières années, j’ai cherché à travers mes installations in situ à me situer en dehors de toute notion de marché. «Keeping our heads above water» et
«Press» sont deux tentatives d’interrogation sur le statut de l’œuvre d’art et les véritables fondements de sa valeur et de son utilité. Le geste artistique s’approche d’une affirmation de la primauté d’un rapport direct et intime entre l’œuvre et le regardeur, celui-ci est invité à un certain engagement physique, mû par sa pure curiosité et sa disposition émotionnelle. Des transformations peuvent résulter de cette rencontre. L’œuvre n’en n’illustre que mieux le fait qu’elle n’existe, qu’elle ne «vaut» que dans et par cette interaction.
Toujours en soif d’apprendre, j’essaie d’amener mes créations à plus de maturité, d’en dépasser les limites et de m’ouvrir par là-même à différentes disciplines.
Il en résulte un travail polymorphe d’où émerge, en filigrane, une réflexion à la fois sensible et aiguisée sur l’être humain et l’état de notre société.
Eva Evrard’s work speaks of humanity. First, the small, microscopic humanity, that which is declined in fingerprints, in the eyes of passers-by pinned like rare insects, in rolls of speech declining opportunities for action, questions, associations of ideas. As if it were necessary to preserve this humanity, to make a discrete but faithful archive of it, a testify of what existed. And the other humanity, that which is the machine of its own dismemberment, of its own disappearance – the one that explodes bodies, that makes them disappear into boxes or in the algorithms of stock market flows, the one of which the only remaining traces are stelae where the names, the coordinates of a vanished life appear, and whose image is mirrored on a vitrified earth.
Under the wise and fragile appearance of the paper, under the fine handwriting and precise gestures, this is what is going on. A per- manent conflict, and yet so minimalist that it becomes almost invisible; an unheard-of violence, and yet almost inaudible, like all those open mouths, fixed in the walls, and of which not a sound, not a word, springs forth. What is played out in each work, and by a subtle correspondence between them, is the contemporary history of our world, and the fate of human bodies caught in its cogwheels; it is the existential threat of a possible and total disappearance; it is to become traces, fossilized bones, hermetic monuments of a lost humanity, reproduced on scale.
H. Feront
L’œuvre d’Eva Evrard parle d’humanité. La petite, celle qui, microscopique, se décline en empreintes digitales, en regard de passants épinglés comme des insectes rares, en rouleaux de parole déclinant des possibilités d’action, des questions, des associations d’idées. Comme s’il fallait conserver cette humanité-là, en faire une archive discrète mais fidèle, un témoignage de ce qui existait. Et l’autre humanité, celle qui est la machine de son propre écartèlement, de sa propre disparition – celle qui éclate les corps, qui les fait disparaître dans des boîtes ou dans les algorithmes des flux boursiers, celle dont il ne reste plus que des stèles où figurent les noms, les coordonnées d’une vie disparue, et dont l’image se prolonge en miroir sur une terre vitrifiée.
Sous l’apparence sage et fragile du papier, sous l’écriture fine et les gestes précis, voilà donc ce qui se trame. Un conflit permanent, et pourtant presque invisible par son minimalisme ; une violence inouïe, et cependant presque inaudible, comme toutes ces bouches ouvertes, figées dans les murs, et dont pas un son, pas une parole, ne jaillit. Ce qui se joue, dans chaque œuvre, et par un jeu subtil de correspondances entre elles, c’est l’histoire contemporaine de notre monde, et des corps qui sont pris dans ses rouages; c’est la menace existentielle d’une possible et totale disparition; c’est de devenir traces, ossements fossilisés, monuments hermétiques d’une humanité perdue, reproduits à l’échelle.
H. Feront
EVA EVRARD
Texte d'Ann Hindry.
Préface d'Hadelin Feront.
Conception graphique : Emmanuel Leroy.
Publié avec le soutien de Frank Lloyd Wright Estate et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Fig. Musée d’art contemporain du Sart Tilman, Liège, Belgique.
Errare Humanum est. La Châtaigneraie, Centre wallon d’Art contemporain, Belgique.
La Danse. céramique murale. Le Point d’Eau, La Louvière. Réalisé dans les ateliers de Keramis. Belgique.
Les péripéties d’un centre d’art contemporain de province. Centre Wallon d’Art Contemporain, La Châtaigneraie. Liège, Belgique.
Unboxing, (solo show), Space collection, Liège, Belgique
Presse, Art Public Liège, Belgique
Presse, Art Public Cologne, Allemagne
Keeping our heads above water, Biennale de Venise, Italie
Positive Control, GNF Gallery, Bruxelles, Belgique
TAMAT, Centre de la Tapisserie, exposition des boursiers, Tournai, Belgium.
Centre Wallon d'art contemporain 9e prix de la Jeune Sculpture de la Fédération WB, Liège, Belgium.
Musée en Plein Air du Sart Tilman 9e prix de la Jeune Sculpture de la Fédération WB, Liège, Belgium.
La Maison Rouge Multiple Art Days, Paris.
Musée des Beaux Arts de Tournai, Belgium.
Gnf Gallery Eva Evrard, Thierry Grootaers, Brussels, Belgium.
YIA Contemporary Air Fair. The redemption of Anneliese Michel, Brussels, Belgium.
Centre Wallonie Bruxelles Images et Mots depuis Magritte, Paris.
Kala Art Institute, San Francisco, United States.
Institut Für Alles Mögliche Berlin.
Centre Culturel d'Anderlecht, Collecting, Brussels.
Ottawa School of Art, Canada.
Art on Paper, Bozar, Brussels, Belgium.
Prix Mediatine 2015, Brussels, Belgium.
NOW, La céramique 50 ans après. Tourinnes, Belgium.
Gnf Gallery, Hunger & Bliss, Brussels, Belgium.
Yvon-Lambert Bookshop Limited Edition Eva Evrard, Paris, France.
NAMOC, Musée National des Beaux-Arts de Chine Images et Mots, Beijing, China.
Art Contest, DE MARKTEN, Brussels, Belgium.
Artist Print, artists books fair curated by Jeunesse et Arts Plastiques et Komplot, Brussels, Belgium.
Gnf Gallery End of the world party, Brussels, Belgium.
Gnf Gallery Snapshot, Belgium.
Artist Print, artists books fair curated by Jeunesse et Arts Plastiques et Komplot, Brussels, Belgium.
L'orangerie, espace d'art contemporain Limites Multiples, Bastogne, Belgium.
Maison de la Culture de Tournai, La micro-édition, Belgium.
ISELP Bruxelles, Belgium. [Zero Gravity](École supérieure d’Art de Metz), Galerie Justin Morin, France.
BOZAR, Palais des Beaux-Art de Bruxelles le Salon du livre d’artiste, Bruxelles, Belgium.
2008-17 École nationale supérieure des arts visuels, ENSAV La Cambre, Brussels, Belgium.
2008-17 École supérieure des arts, ARTS2, Mons, Belgium.
2014-17 École supérieure des arts, Liège, Belgium.
RAVI, Résidences-Ateliers Vivegnis International, Liège, Belgique.
Résidence Le Cheval Noir, Bruxelles, Belgique.
TAMAT, Centre de la Tapisserie, Tournai, Belgium.
Kala Art Institute Berkeley, United States.
Institut Für Alles Mögliche Berlin, Germany.
Ottawa School of Art Ottawa, Canada.
Fondation Carrefour des Arts, Bruxelles, Belgium.
Inside-Out Art Museum Beijing, China.
Premier Prix de La Création de la Ville de Liège.
Prix de la Jeune Sculpture de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Belgique, Lauréate Prix Révélation Livre d’Artiste, La Maison Rouge, Paris, Nominée Prix artistique 2017, Musée des Beaux-Arts, Tournai, Nominée
Prix Médiatine 2015, Bruxelles, Belgique, Nominée
Art Contest, De Markten, Bruxelles, Belgique, Nominée
Un Futur pour la Culture, n°3. « Territoires de Création ». Fédération Wallonie-Bruxelles
Un Futur pour la Culture n°1. « Territoires de Création ». Fédération Wallonie-Bruxelles
Aide à la création. Fédération Wallonie-Bruxelles.
Aide à la production / film. Fédération Wallonie-Bruxelles.
Aide à l’édition / publishing grant, Fédération Wallonie-Bruxelles, Lauréate.
Aide à la création / creation grant, Fédération Wallonie-Bruxelles, Lauréate.
##2016
SMart bourse d’accompagnement, Lauréate.
Parent Artist Residency Programme, Kala Art Institute, Berkeley, États-Unis, Lauréate.
Aide à l’édition / publishing grant, Fédération Wallonie-Bruxelles, Lauréate.
Ottawa School of Art, Canada. ##2013 Central Academy of Fine Arts (CAFA), Pékin, Chine. ##2011 « La réappropriation », musée royal de Mariemont, Belgique.
2019 . Collect, Arts Antiques Auctions, Belgen in de Dogenstad, Nr.491, p 14.
2019 . Flux News Magazine #79, intervention off d’Eva Evrard à Venise, Lino Polegato.
2018 · « En filigrane », L’Art-Même, n° 76, Chronique des arts plastiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles. 2018 · « Coded Messages », VILLAS, n° 95, janvier 2018, p. 154-156. 2017 · R17 TAMAT, Centre d’art contemporain du textile, Tournai, 2017, p. 49-56.
2017 · H art Magazine, n° 168, 2017, p. 26.
2015 · « Art on Paper, le papier s’émancipe ! » L’Éventail, août 2015.
2014 · « Papier, autour et alentours », World Crafts Council, Belgique francophone.
2014 · H art Magazine, n° 133, 2014, p. 4. · « Eva Evrard’s Delicatessen », Belgian Boutique, Helena Heukeshoven.
2013 · « Remake. Le livre et la céramique en question », musée royal de Mariemont, 2014.
2012 · « Pa/per View & Artists Print : Regards croisés ».
2012 · Wiels and Komplot, mars 2012. 2007 · « van de Velde, La Cambre et le livre ». Eva Evrard, performance. Éd. ENSAV, La Cambre. Bruxelles, 2007, p. 36.
Master’s degree in Typography at La Cambre, Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels
Exchange programme at EINA Centre Universitari de Disseny i Art de Barcelona
Eva Evrard : A perspective on the artist’s practice.
By H. Feront
Eva Evrard is a young belgian artist born in 1984. She graduated with an MA in Fine Arts from the Belgian National Institute for the Visual Arts (ENSAV La Cambre) in 2007, having studied typography. These studies initiated in Evrard an interest in the book form not merely as a vehicle for printed content, but as a medium and a concept in itself.
Her early work is characterized by a systematic exploration of the book, particularly with regard to its visual and sculptural possibilities. Each book conceived by Evrard is the result of an empirical process by which the artist, starting from very concrete elements such as a verb, a color or particular kind of material, gradually arrives at a concept embodied by the finished book.
Eva Evrard is thus not a conceptual artist in the sense commonly ascribed to the term: she does not start her project with a particular concept to explore or illustrate, but arrives at a concept through an empirical process of trial and error. This requires a meticulous, repetitive and time-consuming confrontation with the initial materials at her disposal which, in many ways, deploys a performative dimension in her work. It is through sheer repetition and an intense confrontation with her object that Evrard reaches a form rich with visual and conceptual implications.
The intensity of this process is reflected in the forms she develops which are, paradoxically, as minimalist and economical as they are generous in terms of the sensual and intellectual possibilities they offer to the viewer. Indeed, Evrard’s work is never purely formal but often engages with fundamental themes of violence, gender and identity. In her more recent work, which has used ceramics and collage, the presence of these questions has become increasingly exacerbated, while at the same time remaining consistent with her minimalist approach. This often creates an ambiguity for the viewer – while the work may appear, at first, peaceful and measured, it carries a strong emotional and intellectual charge that hints at the violence underpinning the creative process.
Recently, Eva Evrard has received an increasing number of accolades from the institutional world, recognizing the promise and intensity of this young artist. After a first residency at the Inside Out Museum in Beijing in 2013, Eva Evrard is proposing a special edition at Yvon Lambert’s library in Paris. Over the coming months, her work will be shown in Ottawa, Berkeley and Berlin.
EVA EVRARD : Une perspective sur la pratique de l’artiste.
Par H. Feront
Eva Evrard est une jeune artiste belge née en 1984. Elle a obtenu un Master de l’Institut Nationale Supérieure des Arts Visuel de La Cambre en 2007, après y avoir étudié la typographie. Ces études ont généré chez elle un intérêt pour le livre non simplement comme véhicule d’un contenu imprimé, mais en tant que medium et concept en soi.
Ses premières œuvres sont caractérisées par une exploration systématique du livre, en particulier du point de vue de ses possibilités visuelles et sculpturales. Chaque livre conçu par Eva Evrard est le fruit d’un processus empirique par lequel l’artiste, en partant d’éléments très concrets comme un verbe, une couleur ou un matériau spécifique, parvient graduellement à un concept s’incarnant dans la forme-livre.
Eva Evrard n’est donc pas une artiste conceptuelle dans le sens qu’on attribue en général à ce terme : elle ne commence pas ses projets avec pour intention d’explorer ou d’illustrer un concept en particulier, mais parvient au concept par un processus d’essais et d’erreurs. Cela exige de l’artiste une confrontation minutieuse, répétitive et de longue durée avec les matériaux à sa disposition qui, de bien des manières, déploient une dimension performative dans son travail. C’est au travers d’un nombre considérable de répétitions et d’une confrontation intense avec son objet qu’Evrard atteint une forme riche sur le plan visuel et conceptuel.
L’intensité de ce processus est reflété dans les formes développées par l’artiste qui sont, paradoxalement, aussi minimalistes et économes qu’elles sont généreuses au vu des possibilités sensitives et intellectuelles qu’elles offrent au regardant. En effet, l’œuvre d’Eva Evrard n’est jamais purement formelle mais s’engage régulièrement sur des thèmes fondamentaux comme la violence, le genre et l’identité. Dans ses travaux récents, qui utilisent la céramique et le collage, la présence de ces questions est devenue de plus en plus exacerbée, tout en maintenant l’approche minimaliste qui est la sienne. Ceci crée une ambiguïté pour le regardant – tandis que l’œuvre peut, dans un premier temps, paraître paisible et mesurée, elle porte cependant en elle une charge émotionnelle et intellectuelle forte, suggérant la violence qui sous-tend le processus créatif.
Récemment, Eva Evrard a reçu de plus en plus d’accolades du monde institutionnel qui reconnaît la promesse et l’intensité de cette jeune artiste. Après une première résidence à l’Inside Out Museum de Pékin en 2013, Eva Evrard distribue son édition à la librairie Yvon Lambert à Paris. Dans les prochains mois, son travail sera montré à Ottawa, Berkeley et Berlin.
Connue d'abord pour ses livres d'artistes, dans lesquels Evrard déconstruisait l'espace de la page pour faire advenir des architectures minimalistes, l'œuvre de cette dernière s'est élargie ces dernières années à la question de l'espace dans son ensemble et de la place de l'être humain au sein de celui-ci.
Procédant toujours par un travail de déconstruction minutieux de l'espace négatif, Evrard présente aujourd'hui des prototypes d'œuvres monumentales questionnant, à travers les notions d'architecture urbaine, ces autres constructions contemporaines que sont la spéculation financière, l'écart entre les riches et les pauvres, le rôle de l'image dans une société qui en est saturée.
Amorcé successivement par une résidence et une exposition au Musée National des Beaux-Arts de Chine à Pékin, puis à San Francisco et Berlin, ce nouveau développement marque un tournant dans l'œuvre de l'artiste qui, tout en restant fidèle à son esthétique minimaliste, l'utilise pour interroger des thèmes politiques sensibles et projeter cette interrogation dans l'espace public.
Au cœur de cette démarche, on devine le désir de l'artiste d'immerger le spectateur au sein de l'œuvre à venir, de le confronter à des représentations tridimensionnelles, poussant ainsi le spectateur à une confrontation directe, expérientielle, des thèmes abordés. En visant l'espace public de cette manière, Evrard le remet en jeu, affirmant de ce fait que c'est bien au sein de celui-ci que se dessinent les architectures sociales à venir.
Hadelin Feront
Eva Evrard est une artiste belge né à Marchin en 1984. Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre où elle a étudié la typographie, son travail est une riche déconstruction du livre en tant qu’objet, forme et signe. Utilisant l’abstraction ainsi que des techniques sculpturales, elle crée des compositions complexes constituées de nombreuses couches reliées à la main se superposant les unes aux autres et interagissant entre elles. Bien qu’elles se présentent, au premier abord, comme des livres, ces compositions fonctionnent en réalité comme des dispositifs mettant en scène un jeu poétique entre l’information, le temps et l’espace, qui implique le spectateur émotionnellement et conceptuellement à travers la manipulation de l’objet. Dans son travail plus récent, Eva Evrard parvient à conjuguer de manière saisissante l’abstraction et le minimalisme caractéristiques à son œuvre pour suggérer des éléments figuratifs ou les sublimer. Ainsi, par exemple, dans l’un de ses travaux sans titre qui à pour matière première une partition de musique, elle suggère la forme d’un bâtiment industriel dans un geste qui allie à la fois le mouvement, une découpe précise et une source de lumière. Ce travail formel n’est donc pas clôt sur lui-même : partant d’un objet tridimensionnel connu, le livre, il en fait le point de départ d’une exploration des formes, des objets et du monde, jetant des ponts entre des éléments qui peuvent paraître dans un premier temps sans lien, et invitant le spectateur à reconsidérer la valeur et la fonction de chaque élément par rapport aux autres.
Hadelin Feront, curateur de la galerie Nadine Feront.
Angela Detanico et Rafael Lain